Zone de Repli
“I am nothing.
I shall always be nothing.
I cannot want to be nothing.
Yet within me I have all the world’s dreams.”
— Fernando Pessoa, The Tobacco Shop, 1928
For almost eighteen years Jean-Claude Romand managed to pass himself off as an internationally-renowned doctor and medical researcher. Every morning, he would leave by car from his home in the Gex mountains only to spend the day driving aimlessly around the local area. To him, this territory represented a vast fallback zone, where he could lie in wait, alone, for his lies to tragically unravel.
In his eyes, the only road to salvation was to murder his entire family.
I decided to retrace his steps and explore the region myself, from the single perspective of his tortured spirit.
At his trial the psychiatric report concluded that he suffered from a diminished awareness of reality and was neither entirely of sound mind nor entirely unbalanced. By qualifying Romand as semi-mad, however, they were forgetting that every one of us has an impaired awareness of reality. According to their logic, therefore, we are all semi-mad.
« Je ne suis rien.
Je ne serai jamais rien.
Je ne peux vouloir être rien.
À part ça, j’ai en moi tous les rêves du monde. »
Fernando Pessoa, Bureau de tabac, 1928
Pendant prés de 18 ans, dans le pays de Gex, Jean-Claude Romand, s’est fait passer pour ce qu’il n’était pas : un médecin chercheur à la carrière internationale. Il partait tous les matins en voiture et errait aux alentours sans exercer la moindre activité. Ce territoire constituait pour lui une vaste zone de repli dans laquelle il attendait, solitaire, la fin tragique de ses mensonges.
Pour toute délivrance, il n’a pas pu trouver d’autre remède que l’assassinat de toute sa famille.
J’ai décidé de revenir, à mon tour, sur ses pas; de parcourir une région par le biais unique de ce spectre lancinant.
Les experts Psychiatres, lors de son procès, ont déclaré qu’il avait une vision affaiblie du réel, qu’il n’était ni tout à fait sain d’esprit, ni tout à fait fou—un demi-fou— oubliant par là que nous avons tous une vision altérée du réel et que par conséquent, en suivant leur logique, nous sommes tous des demi-fous.